Hommage à Dominique Bernard et Samuel Paty

Vendredi 13 octobre à Arras, l’un de nôtres a été tué par un fanatique islamiste. Nous sommes depuis dévasté.es par cet attentat terroriste au sein d’un établissement scolaire, un attentat ouvertement dirigé
contre l’école publique, laïque et ses personnels.

Nos pensées vont à la famille de Dominique Bernard, à tous ses proches, à ses collègues et aux élèves de la cité scolaire Gambetta-Carnot à Arras. Nous formulons des voeux pour que notre collègue d’EPS et nos deux collègues
agents de la Région se remettent au plus vite de leurs blessures. Nos collègues en tentant de s’opposer à l’assaillant ont pensé avant tout à protéger les élèves et les personnels de l’établissement. Dominique Bernard y a laissé sa vie.

Trois ans après le sauvage assassinat de notre collègue Samuel Paty dont la mémoire nous accompagne bien au-delà des commémorations qui lui sont dues, ce nouveau drame nous replonge dans un effroi incommensurable.

Nous condamnons tous les discours et toutes les polémiques qui tentent de récupérer cet événement tragique. Nous n’oublions pas qu’il y a 3 ans, le ministre de l’époque avait refusé le temps de recueillement des équipes et d’hommage professionnel après l’assassinat de Samuel Paty.

Alors que de nombreuses voix se font entendre pour saluer l’héroïsme de nos collègues de la cité scolaire à Arras, nous pensons que la réaction courageuse qu’ils ont eue révèle la conscience professionnelle si particulière qui anime nos professions, indispensable pour faire face aux réalités des établissements. Les équipes éducatives sont confrontées à d’innombrables problèmes à l’image des inégalités et des tensions qui montent dans la société.

Les réponses éducatives exigent du temps et des moyens en personnels pour répondre aux besoins des élèves. L’idéal républicain de l’école publique et laïque – faire grandir et réussir tous les élèves ensemble
quels qu’ils soient et où qu’ils soient – ne peut reposer seulement sur des personnels toujours moins nombreux, toujours moins reconnus, toujours moins considérés.

Pour nous, l’école de la République n’est pas qu’un idéal à convoquer ponctuellement. Il faut des actes pour assurer la protection, le respect et la valorisation de nos personnes comme de nos métiers. Nous attendons donc de la part de l’État et des collectivités territoriales un soutien concret et complet. Il faut plus d’adultes dans les établissements, plus de personnels en vie scolaire. La sécurisation des établissements pour garantir la sécurité des élèves et des personnels ne pourra pas suffire à écarter tout risque de récidive dans un autre établissement. Les réponses à cette préoccupation impérative ne peuvent en tout cas pas rester des seules responsabilité et initiative des établissements et des équipes.

Cette période de deuil et d’hommages à nos collègues Samuel Paty et Dominique Bernard, assassinés tous deux parce qu’ils faisaient leur métier, ne peut rester sans suite. Ce métier est le nôtre, un métier que nous faisons toutes et tous ici pour transmettre des savoirs, pour apprendre à grandir, à travailler et à échanger avec les autres, pour émanciper par les connaissances, pour libérer des carcans par l’esprit critique. Par-delà l’appréhension qui nous saisit, nous continuerons à l’exercer toujours avec détermination et fierté pour opposer à l’obscurantisme notre confiance en la jeunesse et en l’humanité.